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Centenaire de l'archevêché des églises Orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale

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Sœur Jeanne (Reitlinger)

Julia Reitlinger à Prague, 1923

Photo domaine public

Sœur Jeanne (Juilia Reitlinger) nait le 28 avril 1898 à Saint-Pétersbourg, fille de Nikolai et Lidia Reitlinger, et petite-fille des généraux A.I. Reitlinger du côté paternel et N. S. Ganetsky du côté maternel. Julia N. Reitlinger passe son enfance à Saint-Pétersbourg. Lors de vacances elle se rend en Finlande où elle réalise ses premiers paysages à l'aquarelle. En 1915, elle termine le gymnase privé de la Princesse A. A. Obolenskaïa et elle entre en 4e classe de l’École de Dessin de la Société Impériale d'Encouragement des Beaux-Arts (en russe, Императорское общество поощрения художеств).

À l'été 1917, les sœurs Reitlinger partent pour la Crimée, où leurs parents les rejoignent. En 1918, Julia N. Reitlinger y rencontre son futur père spirituel, Serge Boulgakov, qu'elle accompagnera jusqu'à la mort de ce dernier en 1944. Pendant cette période, elle rencontre aussi les jeunes artistes Elena P. Gertik et Lydia A. Nikanorova. En 1919-1921, elle étudie à Simferopol à la Faculté d'Histoire et de Philologie de l'Université de Crimée. Au cours de ces années, sa mère et deux de ses sœurs décèdent du typhus.

En 1921, avec sa sœur Catherine, Julia N. Reitlinger franchit la frontière de la Pologne puis s'installe à Varsovie où elle donne des cours particuliers et fréquente un atelier de dessin.

En juin 1922, elle s'installe à Prague et y est hébergée par la famille du professeur P.B. Struve. Entre 1922 et 1924, elle étudie à l'Université Charles de Prague, Prague état dans les années 1920 un des plus importants centres culturels et intellectuels de l’émigration russe. Étudiante, Julia fréquente des cercles de chrétiens orthodoxes, entre en contact avec la « Société Philosophique et Religieuse » où elle rencontre à nouveau le père Serge Boulgakov en 1923. En octobre de la même année, à Pcherov, elle participe au premier Congrès des organisations chrétiennes de jeunesse russes en Europe, qui marque le début de l’organisation « Action Chrétienne des Étudiants Russes » (ACER).

La période de Prague marque un véritable tournant dans la vie spirituelle et artistique de la jeune peintre. En cette période, Julia Reitlinger est initiée à la technique de l’icône par Cyrille Matkov, un jeune homme, fils du professeur Matkov, qui lui-même a acquis cette connaissance auprès des vieux-croyants de la région de Pskov. En 1924, elle réalise sa première icône « la tête de saint Jean le Baptiste » réalisée d’après un croquis représentant le père Serge dormant.

En 1925, le père Serge Boulgakov devient le professeur de Théologie Dogmatique du nouvellement créé Institut de Théologie Orthodoxe Saint-Serge à Paris. En suivant son père spirituel, Julia Reitlinger déménage à Paris et s’installe sur la colline Saint-Serge. Avec la bénédiction du père Serge elle continue ses recherches dans le domaine de la peinture religieuse. À cette époque, elle éprouve déjà une certaine contradiction intérieure qui sera déterminante pour sa future créativité artistique : elle est fascinée par l’iconographie ancienne byzantine et russe, mais son sens de la liberté artistique ne lui permet pas d’accepter des formules et des principes iconologiques prédéfinis. À Paris, elle fréquente le milieu des artistes catholiques romains et suit la formation à l’école des « Ateliers d'art sacré ». Tout en maintenant de bonnes relations avec certains professeurs et plus particulièrement avec Maurice Denis, le fondateur de l’école, Julia Reitlinger n’est pas satisfaite de la formation : elle rejette la vision de l’image religieuse proposée par ses amis catholiques, qui lui parait très loin de la tradition orthodoxe.

Photos de soeur Jeanne Reitlinger

En 1927 elle se rend à Munich pour voir l’exposition itinérante de peinture d'icônes des XII-XVII siècles nouvellement découvertes en Russie. En tant que jeune peintre, elle est profondément impressionnée par ce contact direct avec ces icônes anciennes qui sont si nombreuses et si diverses, tout autant que par leurs copies contemporaines rassemblées dans un seul espace du musée.

En 1928 elle devient membre de l’Association « Icône » regroupant des artistes, architectes, collectionneurs et historiens de l’art russe, pour la plupart de confession orthodoxe. Elle y suit les cours d’icône de Pimen M. Sofronov, maitre iconographe vieux-croyant venant de Riga, cours qui ont été pour elle d’une valeur inestimable.

En début des années 1930 elle expose régulièrement ses icônes avec celles des autres membres de l’Association. Sa manière légère et libre de peindre les saintes images en impliquant des éléments d’art moderne n’a pas échappé aux yeux des journalistes et critiques artistiques, émerveillés par ses œuvres. A cette époque elle manifeste déjà une préférence particulière pour les compositions complexes de caractère illustratif.

Icônes réalisées par sœur Jeanne Reitlinger

Entre 1931 et 1932, avec l’aide de sa sœur Ekaterina, elle réalise son premier travail monumental, l’iconostase et la peinture murale sur panneaux pour l’église de Saint-Jean-le-Guerrier à Meudon.

Le 11 septembre 1935 dans l’église Saint-Serge à Paris, Julia Reitlinger prononce ses vœux monastiques en recevant le nom de Jeanne. Dans la vie monastique sœur Jeanne retrouve une stabilité spirituelle et émotionnelle, qui trouvera son expression dans ses réalisations artistiques particulièrement nombreuses à cette période. Parmi ses réalisations, il faut mentionner un triptyque pour la chapelle anglicane du collège Merrifield en Angleterre, l’iconostase et des icônes pour l’église de la Protection-de-la-Mère-de-Dieu (église auprès du foyer pour jeunes femmes isolées, organisé par la vénérable mère Marie (Skobtsov) dans le XVe arrondissement de Paris), un panneau représentant Adam et Eve dans le Paradis pour l’église de la Présentation-de-la-Mère-de-Dieu-au-Temple à Paris (1937), ainsi que l’iconostase et les icônes pour l’église du skite de l’icône Notre-Dame-de-Kazan à Moisenay (1938). Sœur Jeanne réalise également de nombreuses illustrations pour des livres pour enfants.

Peu de temps après la mort du père Serge Boulgakov, sœur Jeanne déménage chez sa sœur à Prague, puis part en Angleterre réaliser sa dernière œuvre monumentale en Europe occidentale, la décoration en fresque de l’église St-Basile-le-Grand dans la maison de la confrérie Saint-Alban-et-Saint-Serge à Londres.

En 1949, sœur Jeanne Reitlinger déménage en Slovaquie. Confrontée à la situation de l’Église orthodoxe très politisée dans ce pays, sœur Jeanne se détourne peu à peu de la vie ecclésiale et abandonne la peinture d’icônes.

En 1955, elle retourne en Russie soviétique avec sa sœur Ekaterina et s’installe à Tachkent. Elle obtient un poste de professeur de dessin et gagne sa vie en décorant des foulards et des châles. Au début des années 1970, elle rencontre le Père Alexandre Men qui devient son père spirituel, et grâce à qui elle recommence à peindre des icônes. Dans les dernières années de sa vie, la surdité et la cécité dont elle souffre l’empêchent de peindre.

Sœur Jeanne (Reitlinger) meurt le 31 mai 1988 à Tchirtchik (Ouzbékistan).

Exposition des peintures murales de Soeur Jeanne Reitlinger de 1997, 1ère partie

Exposition des peintures murales de Soeur Jeanne Reitlinger de 1997, 2ème partie

Une iconographe contemporaine : Soeur Jeanne Reitlinger. Exposition de 1989.

Plusieurs fresques réalisées par Soeur Jeanne Reitliner sont reproduites sur le site de la paroisse Sainte Anne à Northampton.