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Evêque Cassien (Bezobrazoff)
Monseigneur Cassien
Capture écran émission 70ème anniversaire de l'institut de théologie orthodoxe saint serge, INA MGCPB0048795
Serge Bézobrazoff est né le 29 février 1892 à Saint-Petersbourg. Son père fut un haut fonctionnaire du ministère de l'Intérieur et sa mère, née Artsimovitch, une personne pieuse qui, très tôt, fit découvrir à son fils l'amour de Dieu et le goût de la prière.
Licencié d'Université en 1914, Serge Bézobrazoff réussit en 1917 les examens préparatoires en vue de l'obtention de la maîtrise, ce qui lui ouvre les portes d'une carrière universitaire. Tout en poursuivant ses études il entre à la Bibliothèque Publique de Petrograd en qualité de collaborateur d'Antoine Kartacheff, son futur collègue à l'Institut Saint-Serge.
C'est un fait notoire qu'après la chute de l'Empire, en 1917, l'Église Russe connut une période d'un élan de ferveur religieuse et d'un authentique renouveau spirituel, renouveau qui s'était préparé déjà sous l'ancien régime. Comme l'attestera plus tard Monseigneur Cassien : le positivisme, hérité du XIX siècle, cédait peu à peu le pas à un nouvel esprit.
En Russie sous le Nouveau Régime (1918-1922)
Sous le nouveau régime Serge Bézobrazoff demeure en Russie jusqu'en 1922. En 1918, il est élu "privatdozent" de l'Université et enseigne l'histoire de l'Église et des religions aux Cours Supérieurs Féminins, fondés en 1878, où enseignait A. Kartacheff.
Durant l'année scolaire 1920-1921 il est professeur d'histoire des religions à l'Université de Tachkent. À son retour à Petrograd, il enseigne à l'Institut de Théologie de Petrograd, qui fut fondé sous le nouveau régime par le métropolite Benjamin (Kazansky) en remplacement de l'ancienne Académie Ecclésiastique de Saint-Pétersbourg, fermée par le gouvernement bolchevique.
Ces années 1918-1922 furent pour le jeune Bézobrazoff une période de formation scientifique et, en même temps, d'une orientation toujours plus accentuée vers les disciplines théologiques. Il avait alors entre 26 et 30 ans.
Pendant cette période, Serge Bézobrazoff avait l’occasion de visiter le monastère d'Optino ; il y rencontre le starets Anatole dans la cellule duquel il a, pour la première fois, l'idée de devenir moine et prêtre.
En 1921, il est exclu de l'Université en même temps que les professeurs Bénéchévitch, Gloubokovsky et Nicolas O. Lossky. Il est témoin des premières persécutions contre l'Église ; il assiste personnellement au jugement et à la condamnation à mort du métropolite Benjamin.
À l'étranger de 1925 à 1939
À l'étranger on retrouve Serge Bézobrazoff d'abord à Berlin, puis à Belgrade où il fait la connaissance de ses futurs collègues Nicolas Afanassieff, Constantin (Cyprien, en religion) Kern et le professeur Basile Zenkovsky.
À Paris, en 1925, il se trouve être l’un des premiers occupants des locaux où s'organise sous l'égide du métropolite Euloge, le nouvel Institut de Théologie Saint-Serge, que ses fondateurs voulaient voir dans la continuité de l'ancien Institut de Petrograd.
Là, en 1932, il prononce ses vœux monastiques, est ordonné hiérodiacre et quelques jours plus tard hiéromoine. En 1934, il est higoumène et en 1936 archimandrite.
Pendant les années qui précédèrent la Seconde Guerre mondiale, à Saint-Serge, le père Cassien se consacre uniquement à l'étude et à l'enseignement du Nouveau Testament que, sciemment, il aborde en historien.
Les résultats de ses recherches néotestamentaires recouvrant cette époque de sa vie trouvent leur meilleure expression dans l'ouvrage russe publié plus tard et intitulé « Le Christ et la première génération des chrétiens ».
Période d’approfondissement spirituel et théologique (1939-1965)
En août 1939, l'archimandrite Cassien entreprend un voyage au Mont Athos où il se trouve malgré lui retenu jusqu'à la fin de la guerre. Là, il a la possibilité d'acquérir une expérience spirituelle plus profonde de la vie monastique, ce qui ne l'empêche pas de poursuivre dans la paix de la Sainte Montagne ses études néotestamentaires. Il travaille sur sa future thèse de doctorat qui sera intitulée « Par l'eau, par le sang et par l'Esprit » (1 Jn 5, 6-8), thèse qui est consacrée à l'approfondissement du symbolisme dans les écrits johanniques . Il y termine également une volumineuse étude très personnelle sur le thème de la paternité de Dieu dans le Nouveau Testament.
De retour à Paris en 1946, l'archimandrite Cassien reprend sa place de professeur de Nouveau Testament à l'Institut Saint-Serge. Le 23 juin 1947, il soutient sa thèse de doctorat, le 28 juillet de la même année il est sacré évêque de Catane et devient recteur de l'Institut, poste qu'il occupera jusqu'à sa mort.
Monseigneur Vladimir et Monseigneur Cassien
Auteur inconnu (DR)
Pendant cette dernière période de sa vie, la pensée théologique de Mgr Cassien s'approfondit et sa méthode d'exégèse se précise. Fidèle à sa vocation d'historien, il étudie chaque thème qu'il aborde en examinant la pensée des auteurs du Nouveau Testament à travers les étapes successives de l'évolution de cette pensée. Ce principe, en somme simple, est cependant trop souvent ignoré des exégètes qui préfèrent se contenter d'une vue globale où disparaît la pensée spécifique de chaque auteur.
Dans une brochure intitulée : « La royauté de César au le jugement du Nouveau Testament » , Mgr Cassien traite du sujet des rapports entre l'Église et l'État. Dès le début, il pose comme principe que le monde, en tant que créé par Dieu, ne peut être considéré autrement que comme foncièrement bon (1 Tim 4, 4), car s'il ne l'était pas, il ne pourrait pas être transfiguré et le Fils de Dieu n'aurait pas assumé la nature humaine. Or l'État, selon Mgr Cassien, appartient à l'ordre naturel, mais ne doit pas devenir l'objet d'une divinisation idolâtrique.
Si l'apôtre Paul (Rm 13, 1-7 ; 1 Tim 2, 1-2 ; Tite 3, 1) et après lui l'apôtre Pierre (1 Pier 2, 13-17) ont prêché la soumission à l’État, tel n'est pas le dernier mot du Nouveau Testament. Plus tard, en effet, quand la situation historique de l'Église aura évoluée, César est désigné dans l'Apocalypse de Jean par le nombre 666, celui de la Bête. César, se voulant dieu, est dorénavant le persécuteur et ne peut plus compter sur la soumission des chrétiens.
Abordant la pneumatologie du Nouveau Testament, Mgr Cassien ne trouve de théologie de l’Esprit définitivement formulée ni dans les deux premiers Évangiles de Marc et de Matthieu, ni dans les épîtres pauliniennes, mais d'abord dans l’Évangile de Luc plus tardif (Luc 24, 49 ; Act 1, 8 et autres). Le dernier mot est encore dit, selon Mgr Cassien, dans les écrits johanniques (Jn 7, 37-39 J 13, 31 et 59 ; et dans d'autres textes notamment les chapitres 14-16) . Plus particulièrement, la solution du problème du "filioque" est encore donnée selon Mgr Cassien, par Jean (Jn 15, 26 : dans ce verset la procession de l’Esprit du Père seul est exprimée par un participe présent désignant une procession atemporelle ; ce participe est placé entre deux verbes au futur « Il vous enverra », « Il Me rendra témoignage » visant l'événement historique de la Pentecôte) (voir : Mgr Cassien. L'enseignement de la Bible sur la procession de l’Esprit, in "Russie et chrétienté", 1950, Nos 3 et 4).
Traitant du problème de la primauté de l'apôtre Pierre, Mgr Cassien suit la même méthode pour voir la solution définitive dans l’Évangile de Jean.
Dans ce court aperçu de la vie et de l'œuvre de l'ancien recteur de notre Institut, nous ne pouvons pas nous arrêter sur tous les aspects de sa pensée : il faudrait parler de ses études sur la prière "Notre Père", parler de son ecclésiologie, de la théologie du judéo-christianisme, de son activité et de ses écrits œcuméniques. À la fin de sa vie il se fit remarquer comme observateur au concile de Vatican II. Il croyait à la possibilité de l'unification de l'Église.
Mgr Cassien est rappelé à Dieu le 5 février 1965.